On ne les remarque pas au premier abord et pourtant, elles participent pleinement à l’expérience des Parcs Disney. Il s’agit des musiques d’ambiance, qui résonnent aux quatre coins de Disneyland Paris, pour mieux nous plonger dans ses univers de rêve.
Walt Disney et ses Imagineers étant avant tout des cinéastes, il était naturel qu’ils conçoivent Disneyland Resort à la manière d’un film, avec son scénario, ses décors, ses acteurs (Cast Members et visiteurs) et sa mise en scène. Et il était tout aussi naturel de lui imaginer une bande-son.
Cette bande-son un peu particulière, c’est la musique d’ambiance, que l’on appelle également BGM (Background Music), élément essentiel de la thématisation si chère aux Imagineers.
Aux tout premiers temps de Disneyland Resort, ce type de musique était plutôt joué en live par différents ensembles disséminés à travers tout le Parc. Toutefois, outre les musiques d’attractions, on trouvait déjà quelques musiques d’ambiance enregistrées. Ainsi, les visiteurs qui entraient dans Fantasyland via le Sleeping Beauty Castle étaient accueillis en chanson, avec « When You Wish Upon A Star », véritable « il était une fois » musical. A l’entrée de Frontierland, c’était un vieil air de banjo qui servait d’introduction tandis qu’à Adventureland, il s’agissait de tambours indigènes et de bruits de la jungle. Ces BGM très courtes (de l’ordre de quelques minutes) tournaient en boucle (ou « loop »), suivant le principe des « muzak », ces musiques d’ambiance diffusées dans les commerces américains à partir de 1934.
Progressivement, au début des années soixante, certaines attractions en extérieur et autres files d’attentes de Disneyland Resort se dotèrent à leur tour de leurs propres musiques d’ambiance produites spécialement pour l’occasion. C’est ainsi que le compositeur Buddy Baker (« Grim Grinning Ghosts ») écrivit un nouvel arrangement de la chanson de Blanche-Neige « Je Souhaite » pour le Puits aux Souhaits de Snow White Grotto (1961), en l’agrémentant de clochettes. Certaines musiques pouvaient également changer en fonction du moment de la journée ou de la période de l’année. Ainsi, l’orgue de Swiss Family Treehouse (1962) qui jouait la plupart du temps la fameuse « Swisskapolka » du film Les Robinson des Mers du Sud (1960) (également composée par Buddy Baker) se mettait à faire entendre des Christmas Carols durant la période de Noël. C’est d’ailleurs ce qui se passe encore aujourd’hui sur Main Street, U.S.A. pour les fêtes de fin d’année, durant lesquelles on peut apprécier une musique d’ambiance spécialement conçue pour ce moment.
Au fil des années, les musiques d’ambiance furent progressivement étendues à l’ensemble du Parc, en commençant par Main Street, U.S.A. Mais c’est alors que se posa la question de leur thématisation.
Comme dans un film, le choix des musiques est particulièrement crucial pour la cohérence des histoires et curieusement, les premiers enregistrements diffusés dans Main Street, U.S.A. relevaient plutôt de la pop des années 1960, tel le fameux « Mrs. Robinson » de Simon & Garfunkel, misant davantage sur l’émotion que sur l’aspect historique.
Surpris par ce décalage, l’homme de radio Jack Wagner (qui fut longtemps la voix officielle de Disneyland Resort) proposa en 1970 au Vice-Président de Disney Entertainment de l’époque Bob Jani de concevoir une musique d’ambiance plus en accord avec le thème du Land. En s’appuyant principalement sur des disques Disney de l’époque, et notamment des arrangements pour fanfare, il conçut un loop davantage dans l’esprit du tournant-du siècle. A tel point que Disney lui confia la conception des BGM de plus de 40 zones pour Disneyland Resort et Walt Disney World qui demeurent, encore aujourd’hui, des références du genre.
Elles inspirèrent d’ailleurs les Imagineers pour la conception des musiques d’ambiance de Disneyland Paris dont certaines, comme un joli retour des choses, seront utilisées dans les Parcs américains.
Les musiques d’ambiance de Disneyland Paris fonctionnent comme des musiques de film, à la différence que c’est au visiteur de créer ses propres séquences au gré de ses déplacements dans le parc. Et de même qu’il existe plusieurs formes de musique de film, il existe plusieurs formes de musiques d’ambiance.
Il y a celles qui servent à planter le décor et à nous transporter dans un autre lieu ou une autre époque grâce à des thèmes et des sonorités d’un autre temps. Au cinéma, c’est le cas notamment de La Princesse et la Grenouille (2010) ou de La Belle et le Clochard (2019) dont les musiques inspirées du jazz New Orleans nous replongent dans l’Amérique des années 1910-1920. Sur Main Street, U.S.A., il s’agit essentiellement de « ragtime », un style typique du tournant-du-siècle américain, la période d’inspiration du Land. On peut ainsi y entendre des œuvres de Scott Joplin ou Arthur Pryor, ou des musiques plus récentes, tirées de films comme Pollyanna (1960) ou Là-Haut (2009), arrangées dans le même style.
La musique a aussi le pouvoir de nous faire voyager à travers le monde, notamment grâce au choix des instruments. Ils peuvent être chinois, comme dans Mulan (1998), ou celtiques, comme dans Rebelle (2012). Ce même principe s’applique à Adventureland, qui regorge de musiques exotiques, jouées par des percussions africaines au niveau de Restaurant Hakuna Matata, ou par des ensembles orientaux pour la zone d’Adventureland Bazar.
D’autres musiques de film procèdent essentiellement par citations ou références. Dans Toy Story 2 (1999), lorsque Buzz investit le repère de Zurg et saute sur des pièces en suspension, chaque saut fait résonner une note du thème d’Ainsi Parlait Zarathoustra, référence évidente au classique de la science-fiction 2001 : L’Odyssée de l’Espace(1968). Et plus récemment, dans Les Indestructibles (2004), le compositeur Michael Giacchino nous replongeait dans l’ambiance des films de James Bond en s’inspirant des arrangements classiques de la célèbre franchise.
C’est exactement ce qui se passe au Parc Walt Disney Studios, dont la BGM s’enrichit de dizaines de musiques de film (au niveau de la Place des Frères Lumière) et de dessins-animés (à Toon Studio) et nous situent immédiatement dans des studios de cinéma. Et à Frontierland, les musiques des grands classiques du western tels Les Sept Mercenaires (1961) nous emportent immédiatement dans l’Ouest américain. Mais pas n’importe lequel : un Ouest mythique et trépidant !
Enfin, la musique de film, c’est aussi très souvent une musique originale, composée pour une production en particulier. A Disneyland Paris, c’est le cas de la musique de Discoveryland, une bande-son unique écrite précisément pour l’occasion par le pianiste et compositeur David Tolley. Du sur-mesure !